Les certitudes par unlucky lucke
J’étais là, le jour ou c’est arrivé.
Je devais avoir entre deux ou trois ans…
C’est mon premier souvenir.
Mon père conduit, il est derrière le volant de la 4L bleu clair. Ma mère est sur la trajectoire de la voiture, elle tient un « pic » de parasol ! Une arme dérisoire, mais qui atterri sur le pare brise… Elle a eu le temps d’éviter la voiture qui fonce sur elle ! Je suis sous la véranda, d’une petite baraque que nous habitons, depuis un an peut-être…
« Salope » ! Il la jette sur le lit, lui saute dessus, il est à califourchon sur elle. Il la gifle, la bourre de coups de poing ! Lui déchire sa robe, qu’il juge déjà, trop courte… Je hurle de terreur je n’ai pas plus de trois ans.
C’est mon second souvenir ! Nous quitterons Djibouti quelque semaines plus tard… Je ne me souviens pas de l’avion !!!
De mon enfance je ne me souviens que de cette terreur viscérale ! Le bruit d’un diesel, le bruit d’une porte, d’un pas furtif qui se glisse derrière moi ! De mon enfance, je n’ai de souvenir que pour les coups que j’ai pu recevoir… De mon enfance, je n’ai que le son des coups qui pleuvent sur ma mère, mon frère ou ma sœur… De mon enfance, je n’ai en tête que les brimades, et les punitions sadiques qu’il avait le don d’inventer… J’ai en tête et en souvenir dans mon oreille, le son de toutes les voix qui ont dit ou qui disent mon prénom… Mais de lui je ne me souviens pas du son de sa voix disant, ou appelant mon prénom !
Ma dentiste a eu une remarque qui m’a fait sourire… « On dirait que vous avez pris des coups ! » Elle ne savait pas, elle est resté conne quand je lui ai dit que c’était les séquelles des coups reçus quand j’étais gamin ! J’ai souris parce qu’un quart d’heure plus tôt, elle avait eu une tirade sur les « cas sociaux », qui pissent leur RMI et fracassent leur famille ! Marrant de voir les gens bien pensant, qui voient leurs certitudes s’effondrer, devant un costume cravate, qui parle bien…
Ce père que j’ai eu, je ne l’ai plus revu depuis bien des années ! Une raclée de trop, et je l’ai envoyé à l’Hospital… Mais quand j’entend le bruit d’un vieux diesel, je sens mon ventre qui se tord.
Et puis d’un coup, quasiment vingt ans plus tard, j’apprend qu’il vit toujours… Qu’il est un clochard, un SDF… Que la vie l’a rattrapé… Et là, se sont mes certitudes qui s’effondrent. Moi, qui, lorsque je vois la neige tomber, pense à tout ces gens qui souffrent de ne pas avoir de toit… Je sais maintenant que mon père est là quelque part et qu’il fait parti de ces ombres couchées sur les bancs…
Comme quoi, les certitudes, et les sentiments, ne font pas bon ménage…